Six choses à retenir de la COP22

La conférence sur le climat de Marrakech approche doucement de son terme : la plénière de clôture qui devait commencer en milieu d'après-midi a été repoussée en début de soirée. Les négociateurs restent à l’œuvre et il n'est pas impossible que, dans la grande tradition des conférences sur le climat, la COP22 joue les prolongations tard dans la nuit, voire jusqu'à demain.
On ne sait donc pas encore précisément ce qui en sortira, il faut attendre le communiqué final et prendre le temps d'analyser les documents pour ça, mais on peut déjà en retenir quelques points marquants.

En bref, tout s'est passé comme prévu


A ce stade, c'est prendre un petit risque de l'affirmer mais, sauf rebondissement de dernière minute, il n'y aura eu aucune surprise pendant la conférence de Marrakech. La CMA1 a été ouverte et rapidement suspendue, un programme de travail a été défini jusqu'en 2018 pour aboutir à la mise en œuvre de l'Accord de Paris, la proclamation de Marrakech - voulue par le pays-hôte - a été adoptée, etc. Comme prévu la COP22 a été surtout une COP d'organisation, sans avancées concrètes.
La communauté internationale a fait ce qu'on attendait d'elle, ni plus ni moins. A la fin d'une année aussi tourmentée, on peut considérer que c'est une réussite, ou bien se souvenir que les engagements de Paris, confirmés à Marrakech, sont toujours insuffisants. Libre à chacun de voir le verre à moitié vide ou à moitié plein...


L'Accord de Paris ne prendra pas réellement effet avant 2019


Là encore ce n'est pas une surprise mais ça reste sans doute l'information la plus importante de cette COP22.
L'Accord de Paris a beau avoir battu tous les records de vitesse, la grosse machine onusienne a son inertie. Avant que le texte puisse réellement prendre effet, il faut en préciser le fonctionnement, rendre ses mécanismes opérationnels, s'entendre sur des méthodologies... La communauté internationale s'est donné comme objectif de finaliser ce "rulebook" (règle du jeu) en 2018, lors de la COP24. Celle-ci se déroulant, comme toutes les COP à la fin de l'année, l'Accord de Paris ne sera opérationnel au mieux que début 2019.


L'élection de Donald Trump pendant la COP22 ¯\_(ツ)_/¯


L'élection de Donald Trump a été un choc à Marrakech comme partout dans le monde. Personne ne sait ce que fera le nouveau président après son entrée en fonction en janvier mais le risque d'un démantèlement de la politique climatique américaine et d'une démobilisation de la communauté internationale est évident.
Beaucoup de temps a été consacré pendant la COP22 à expliquer pourquoi l'élection américaine ne changerait rien. Ce qui pouvait ressembler à de la méthode Coué s'est finalement avéré assez exact, à court-terme au moins : on voit mal comment le déroulement et les résultats de la conférence de Marrakech auraient été très différents en cas de victoire d'Hillary Clinton.


La mobilisation est toujours là


Après la mobilisation exceptionnelle de la COP21, on pouvait craindre que la conférence de Marrakech apparaisse bien pâle. Ça n'a pas été le cas.
La "zone bleue" de la COP22 a accueilli près de 30.000 délégués, beaucoup d'autres visiteurs ont parcouru la zone verte et les espaces ne nécessitant pas d’accréditation.  Plus de 1200 manifestations, ont eu lieu pendant les deux semaines. Et près de 80 chefs d’État et de gouvernement ont fait le déplacement.
Pour une COP dont on attendait rien de concret (et qui a tenu ses promesses), c'est remarquable. Incontestablement, c'est la preuve que le climat reste en haut de l'agenda : aucun autre sujet n'a la capacité de mobiliser aussi largement la communauté internationale.


La société civile est désormais au premier plan


Et c'est probablement un des paradoxes de cette conférence. Pendant longtemps, les négociations internationales ont tiré la mobilisation sur le climat. Les deux semaines des COP, chaque fin d'année depuis près d'un quart de siècle, permettaient de rappeler régulièrement l'enjeu à des médias, des entreprises, des collectivités, des syndicats, etc. qui avaient tendance à l'oublier.
Aujourd'hui on voit la dynamique s'inverser : la mobilisation de la société civile va beaucoup plus vite que les négociations. Désormais, c'est le processus onusien qui apparaît comme un boulet au pied de l'action climatique - le délai de 2 ans pour mettre en œuvre l'Accord de Paris en est un bon exemple. Et la situation va probablement s'aggraver avec la mauvaise volonté des États-Unis.
Afin que chacune puisse suivre sa propre dynamique, peut-être serait-il temps de mieux distinguer les deux facettes des conférences sur le climat : d'un coté ces pénibles négociations onusiennes et de l'autre un grand forum international permettant à tous les acteurs de la lutte contre le changement climatique de se rencontrer et de faire connaître leurs projets ?


Les deux prochaines COP auront lieu en Europe


Où se retrouvera-t-on l'année prochaine ? A Bonn, pour une COP23 sous présidence fidjienne mais organisée dans les locaux de l'UNFCCC. Et l'année suivante, c'est la Pologne qui accueillera la COP24.
C'est très pratique pour moi, mais ce n'est pas très inspiré : Ce sera la quatrième fois que l'Allemagne accueille une COP et la Pologne (qui est par ailleurs loin d'être exemplaire en matière de climat) en a déjà organisé 2 en 10 ans...



Publié le 18 novembre 2016 par Thibault Laconde



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